De la Mère Universelle à Europe
Au commencement était la Déesse-mère. «Sous quelque nom qu'il te plaise d'être adorée, reçois nos hommages»: Catulle évoquait ainsi le Principe unique et cependant multiforme, l'Idée-mère de toutes les autres.
Génitrice, c'est souvent sous une forme féminine qu'elle est représentée: Diane, Isis, Déméter, Belisa, Marie, Cybèle, Tanit à Carthage ou à Ibiza,Durga, Kali en Inde, Anaïtas chez les Mèdes, Allittat chez les Arabes, Freyja en Scandinavie, Notre-Dame de Bon Secours, «Méné chez les Hébreux idolâtres». L'étude systématique de ses représentations et de ses attributs à travers médailles, monnaies, statues permet de dégager ses trois fonctions; la «Déesse aux trois visages», la «Reine des trois cités», la «Souveraine des trois corps», tour à tour brutale, chasseresse, destructrice, tendre, généreuse ou impassible, protège, inspire et guide.
Là, c'est la lance, l'épée ou l'arc qu'elle brandit; ailleurs, et quelle que soit la civilisation, du Mexique à la France, de l'Artémis-Diane gréco-romaine à la Marianne des révolutionnaires de 1789, c'est sa poitrine nue qu'elle expose, pour allaiter ses enfants; là c'est le Livre de la Loi, des traités d'art aux lois ou autres enseignements; de sa torche, la voici qui éclaire le monde; de sa corne d'abondance, elle déverse fleurs, fruits ou or.
La diversité de ces figurations reflète celle des sentiments humains, puisque les ressorts intimes des êtres ont besoin de s'incarner tôt ou tard dans une allégorie, une image.
Au-delà de l'individu, l'organisation sociale a besoin d'être traitée de façon symbolique: il faut que l'Etat, entité abstraite, prenne un visage. Dans la République laïque, née de la Révolution, Marianne donne une forme au consensus national. Cette même nécessité d'un emblème identifiable par des individus de nationalités différentes a conduit à la création d'Europe, figure renouvelée de la nymphe enlevée par Jupiter, devenu taureau pour la séduire. La poitrine nue, émergeant de la matière, la nouvelle image-mère est une vestale. Sa main droite levée évoque à la fois spiritualité et rigueur. Sa main gauche est ouverte en signe d'accueil. Par son corps tendu, elle est devenue l'arc de Diane. Gardienne des valeurs qui réunissent les douze nations, elle est aussi, par sa démarche esquissée dans le bronze, mouvement vers les autres continents.
La nymphe Europe, selon certains Grecs, recevait des rêves prémonitoires et savait écouter le sage guide Hermès. De plus, son nom signifie «large regard».
Pouvait-on souhaiter de meilleurs auspices pour les douze pays de la Communauté européenne?
Emmanuel-Yves Monin
Extrait d'un article écrit par Emmanuel-Yves Monin
paru dans ''Métal pensant''
revue de la médaille d'art 1990/C .
À voir aussi :
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La Mère Universelle
Depuis l'origine des temps et dans tout l'univers, les humains ont toujours honoréla Mère Universelle,
figure allégorique féminine, omniprésente dans toutes les civilisations sous de multiples noms et d'innombrables formes. Depuis l'époque des Vénus paléolithiques, des Déesses-Mères de l'Antiquité jusqu'aux représentations laïques modernes, au centre de toutes les religions, ces figures mettent en avant toujours les mêmes attributs, révélateurs des fonctions qu'elles occupent.....
http://lamereuniverselle.fr/